Pénurie des sens

A l’occasion de notre grand concours de récits érotiques organisé en collaboration avec le Salon de la Littérature Erotique, nous partageons avec vous les 5 textes finalistes qui ont été exposés sur notre stand pendant l’évènement. Les visiteurs du salon ont eu l’opportunité de voter pour leur récit favori et ainsi d’élire le texte gagnant « C’est un jeu »

Avec 20% des votes, le récit « Pénurie des sens » arrive en seconde position de notre compétition. Félicitations à Shiva__ pour cette œuvre emplie de sensualité et de volupté .

Pénurie des sens

La plaine dégagée sur l’horizon conférait au paysage un contraste de plénitude, tandis que les automobilistes s’agaçaient à mesure de l’allongement d’une ribambelle de véhicules à la pompe. C’était la pénurie d’essence.

C’est aussi la pénurie qui m’avait conduite ici. Celle du désir. Celui qui s’était consumé lentement, pour un couple qui, à son apogée, faisait pourtant rêver. Digne d’un conte de fée. L’envie de moi et de mes chairs intimes avait disparu du regard de mon Prince ; charmant en son temps. La tendresse devenue mollesse.

Perdue dans mes pensées, je pouvais encore faire demi-tour. Un baiser volé à l’issue d’un premier rendez-vous suffit-il à conclure un contrat d’adultère ? Fréquenter le site du fruit défendu, croqué du péché originel, n’était-il pas motivé par la volonté de m’affranchir de tout engagement, pour me sentir libérée et désirée encore ? Donner libre cours à la fougue de mes fantasmes, raviver les braises au creux de mon ventre ?

D’une étreinte, d’un effleurement sur ma nuque, d’un souffle dans le creux de mon cou, d’un baiser sur mes lèvres, de sa langue valsant avec la mienne, sa paume posée sur mon cul… Il avait instantanément rallumé ma flamme. Une fraction de seconde avait suffit. Effet cocaïne, j’étais prise au piège. J’allais devenir addict à ce dealer d’ocytocine.

Ainsi, je succombais à la tentation. IL, déjà expert de l’amant/ami, m’avait naturellement entraînée dans notre premier jeu de rôles, qui m’amènerait dans quelques minutes chambre 69 de l’hôtel d’à côté. Montée sur des escarpins, simplement vêtue d’un trench coat, couvrant des bas noirs assortis à ma parure de dentelle Lise Charmel. Celle-là même que j’avais investie pour redonner vie, par l’élégance et le glamour, à la libido de feu mon amoureux qui stagnait à l’apex lymphatique. Échec. Boner inerte. Bonheur perdu.

Pièce obscure. Dès lors que j’eus passé l’entrebâillement de la porte, je basculais dans un ailleurs. Il me cueillit aussitôt d’un bandeau délicatement posé sur mes yeux. Je comprenais plus tard le crime à cacher. Chaque parcelle de mon corps en tension fit l’objet d’une minutieuse chasse au trésor, à l’endroit précis où l’érogène comatait jusqu’alors.

Chaque fois, mes sens en émoi, sens dessus-dessous, sans dessous, je me sentais proie fébrile. Bienveillant mais ferme. De gestes voluptueusement mécaniques, je chavirais. Prenais la pose à son souhait, avant qu’il initie sa conquête de mes plaisirs.

Exploration sensuelle, débauche charnelle, envahisseur passionné. C’était le mâle Alpha, le conquérant pornographique de tous mes phantasmes. Le prédateur lapait ma mouille comme un assoiffé. De sa langue, ses griffes, sa queue. Au creux de mon ventre. Mon Pairi-daeza comblé, mon antre éprouvée ; mon Être tout entier se délectait. Transporté.

IL reniflait, léchait, fouillait, croquait, me fourrait. Du bord de la falaise, happée par sa fougue, quand je plongeais tête la première dans cet océan de plaisirs, que je croyais me noyer dans l’intensité de la jouissance accrue, IL me saisissait in extremis.

Soumise aux salves de ses assauts, s’ébrouant aux décibels de mes supplications ; il grondait des mots doux, des mots sales, avant de m’infliger ses dernières décharges apocalyptiques. Phalanges crispées, je saisissais le matelas, un tissu, son crâne, son fessier… Mon plaisir contenu par la honte de ces scénarios luxurieux, explosait toujours.

Retour au calme. Corps enlacés. Silences entendus. Un regain de vie m’animait. Chaque fois n’était qu’un début.

Shiva__

Découvrez les autres textes finalistes :

Evasion tropicale
Le pissenlit
L’envie d’ailleurs