« Je n’oublierai jamais le jour où j’ai appris que ma femme me trompait. » Ainsi débute, in medias res, le nouveau roman de Philippe Vilain publié cet hiver chez Grasset, plongeant avec cruauté le lecteur dans le même désarroi et la même stupeur que son narrateur.

Le héros de La Femme infidèle est un homme qui a la certitude de former un couple solide, qui loue la loyauté de son épouse et qui n’éprouve aucune désir d’indépendance. Il « cristallise », dirait Stendhal. Il aime être avec elle, la sublime comme un personnage romanesque, lui envoie plein de textos chaque jour. Et c’est – ironie du sort – par ce moyen de communication moderne, qu’il tombera subitement, par hasard, de son petit nuage. Le message qui apparaît sur l’écran du téléphone portable de sa chère et tendre, alerte magique à l’amour, est sans ambiguïté, comme celui qui s’étale sur la première de couverture de l’ouvrage: « Je suis toute à toi ».

Que faire? Rien

C’est sûr, Philippe Vilain surfe sur un phénomène de société bien connu des membres de Gleeden. Qui n’a jamais éprouvé de sueurs froides ou pire, connu de catastrophe, suite à un message laissé sur le mauvais répondeur, à un smartphone tonitruant qui affiche la couleur ou à un email oublié dans la corbeille? Laisser le moins de traces possibles, privilégier les mots de passe: on vous l’a dit et répété!

L’originalité de ce roman tient au point de vue interne: on pénètre l’esprit d’un homme qui se découvre trompé. Là où seraient attendus les lamentations et l’orgueil du mâle dévirilisé, éclats de voix, démonstrations de pouvoir, prise en faute humiliante, on découvre un univers plus subtil. L’homme ne dit rien, il se contente d’observer attentivement sa femme. Mieux, il réapprend à la connaître et cherche à percer le mystère de sa personnalité. Son introspection explore ainsi les méandres de leur histoire, le « roman de leur couple », cette part de construction imaginaire, falsifiée, qui est le lot de toute rencontre. De manière voyeuriste, il se perd aussi dans l’observation du mensonge, ce jeu social pratiqué par son épouse, la fascinante Morgan Lorenz.

Il franchit diverses étapes: colère, incompréhension, retour de flamme, acception, doute… L’écriture est fluide et familière, quasi automatique, comme si elle donnait accès au flux des pensées qui traversent un être face à un événement traumatique.

Le choix du silence sauvera-t-il ce couple? Et si finalement tout ça n’était pas si grave? Et si l’important résidait dans le réveil des sens et des émotions?

Ecrit par LOLA VS

Philippe Vilain a publié chez Grasset Faux-père (2008), Confession d’un timide (2010) et Pas son genre (2011) La femme infidèle (2013)