Queeny partage son expérience dans une boutique de lingerie, et plus particulièrement son premier achat d’une guêpière…

LA BOUTIQUE

Je pousse enfin la porte de la boutique. En entrant toute essoufflée par ma course à travers les rues piétonnes, je suis surprise par le nombre de clientes à l’intérieur. Apparemment, je ne suis pas la seule à avoir eu l’idée de génie de faire mes achats un samedi après-midi !

Quelques maris, l’air embarrassé voire inintéressé, se sont calés dans le coin masculin de la boutique et attendent patiemment que leur épouse les appellent de derrière le rideau de la cabine d’essayage pour leur demander leur avis ou directement lorsque elles arrivent à la caisse, pour payer.

Moi, je suis venue seule. Réussir à me libérer de ma cage dorée ne fut pas chose facile. Après avoir fait le rangement du linge, du courrier familial, être allé chercher le pain, avoir passé l’aspirateur, mis la petite à la sieste et mon mari sur son canapé, j’ai gagné le droit de prendre la voiture pour rejoindre la civilisation des consommateurs avertis. Tel un souffle de liberté conquise après maintes négociations et préparations pour que tout soit parfait, que rien ne gêne le confort de la petite famille sans moi pendant 3 heures.

Je commence à fureter, à regarder les collections exposées, les couleurs sont principalement le rouge, le noir et le blanc. Tout est bien trié par taille, par bonnet… Tout est si tentant !

LA PRISE DE CONSCIENCE

Combien de fois ai-je regardé ces rayons en me disant que ce n’était pas pour moi ? Ou plutôt combien de fois suis-je passée devant ces vitrines avec une totale indifférence ?

Dans le rush du quotidien, pourquoi s’ennuyer à serrer sa taille, pourquoi se parer d’une petite culotte soyeuse que personne ne regarde. Je m’habille seule le matin, je me déshabille seule le soir. Mes critères de choix n’étaient jusque alors liés qu’à ma vision gestionnaire de mon temps et de mon argent : confortable et pratique.

Les yeux de mes amants m’ont enfin fait comprendre l’importance de plaire et de se plaire.

Sentir l’excitation qui monte pendant un baiser, une étreinte ; alors que ses mains glissent sur mes hanches, devinant le porte-jarretelles et le string sous ma jupe… Le désir monte grâce à la suggestion du sous-vêtement !

J’avais quand même quelques string à leur mettre sous la dent, des bas de nuit ou de jour, mais pas de guêpière ni de body ! Je trouve que ces sous-vêtements envoient un message complice : « Déshabille-moi, fait l’effort de découvrir mon corps et regarde moi ».

L’ESSAYAGE

Bref, il était temps de remédier à ce manque, d’autant plus que mon esprit était prêt à assumer ces tenues. Mon regard se porte rapidement sur une tenue rouge. La dentelle entre les baleines paraît si fine et les broderies sur la poitrine sont un travail d’orfèvre. Je recherche la culotte ou le string assorti mais pas de chance, plus d’article dans ma taille.

Et me voilà à patienter pour avoir une cabine d’essayage.

Enfin, une cabine se libère. Je savoure ce moment tellement fantasmé.

Premier obstacle : comment enfiler seule une guêpière avec toutes ces agrafes ? Je prends mon temps et je commence à les fixer une à une en plaçant le corset sur mon ventre ; puis je le glisse délicatement en prenant soin de ne pas percer la dentelle et le replace sur mes seins.

LA RÉVÉLATION

Je me regarde dans le miroir et je me reconnais à peine.

Le rouge me redonne des couleurs aux joues, le corset m’affine la taille. Je suis particulièrement surprise par la sensation du tissu sur ma peau, la souplesse des baleines et la douceur. J’attache mes bas aux jarretelles pour ajuster à ma taille. Je ne pensais pas que cette tenue serait aussi confortable. J’ai envie de prendre mon temps dans la cabine. J’aime ce que je vois. J’ai envie à cet instant de ses mains curieuses et avides. Je sors mon téléphone et ne résiste pas à la pulsion de me prendre en photo pour la lui envoyer par sms. Comme une promesse de fièvre. Mon premier choix est le bon, je me trouve belle en rouge, pas parfaite bien sûr, mais sexy pour moi tout d’abord. Je me rhabille rapidement et m’aperçois que j’ai passé beaucoup de temps dans ce magasin et que le temps que je m’étais autorisé est déjà écoulé. Je règle rapidement mon achat et sors de la boutique, l’esprit ailleurs, fière d’avoir dépasser un blocage ridicule sur ma taille. Un sms me sort de ma torpeur ; il a répondu à ma photo : « J’ai hâte de te voir dans cette tenue, impatient de te toucher…».

Heureuse, je souris béatement en marchant. Les passants qui me croisent doivent me trouver bizarre. Je me vois déjà en guêpière rouge, dans notre chambre d’hôtel, l’attendant fiévreusement. Son entrée dans la chambre, tel un ouragan, m’intimant de ne pas le toucher, de le laisser me regarder. Il caresse mon corset qui est comme une seconde peau pour moi et me susurre à l’oreille « c’est fou l’effet que tu me fais ».

Un klaxon de voiture retentit et m’extirpe de ma vision.

J’ai dû traverser un passage piéton en force et un automobiliste vocifère. C’est l’effet guêpière.